Les mouvements de grève au Tchad : revendications légitimes ou instruments d’une déstabilisation orchestrée depuis l’étranger ?
Depuis quelques semaines, le Tchad est secoué par une série de mouvements sociaux préoccupants, notamment dans les secteurs vitaux de la santé, de l’éducation et de l’enseignement supérieur. Tandis que les travailleurs de la santé menacent de paralyser les hôpitaux à partir du lundi, les enseignants des écoles publiques sont déjà en grève, affectant le bon déroulement de l’année scolaire. Du côté de l’enseignement supérieur, les étudiants de l’Université de N’Djamena sont également entrés dans la contestation. Le 16 octobre 2025, à l’issue d’une réunion avec les représentants des différentes filières, ils ont lancé un ultimatum de 72 heures au Centre National des Œuvres Universitaires (CNOU), pour répondre à leurs revendications concernant les transports, la restauration et les horaires. À défaut, ils menacent d’organiser une manifestation et de rompre toute collaboration avec le CNOU.
Dans la continuité de cette mobilisation estudiantine, l’Union Nationale des Étudiants Tchadiens (UNET) a annoncé une grève générale dans toutes les universités du pays, du 20 au 27 octobre 2025. Ce mouvement fait suite à la fermeture prolongée des restaurants universitaires et à l’arrêt des bus de transport étudiant. L’UNET exige la réouverture immédiate de ces services essentiels et appelle les étudiants à observer la grève avec discipline.
Le Syndicat des Médecins du Tchad (SYMET) a annoncé une grève d’une semaine, du 20 au 26 octobre, pour exiger de meilleures conditions de travail. Parmi les revendications : la régularisation de leur statut, l’unification des primes, le paiement des arriérés de salaires, les indemnités de logement, ainsi que la fourniture adéquate d’équipements et de médicaments essentiels. La situation est alarmante, et le syndicat n’écarte pas un durcissement du mouvement si aucune réponse concrète n’est apportée par le gouvernement.
Dans le même temps, le secteur éducatif est également paralysé. Les enseignants des écoles publiques, en grève, ont indirectement entraîné des perturbations dans certaines écoles privées, où les élèves, venus manifester leur solidarité, ont causé des troubles, forçant la fermeture temporaire de plusieurs établissements.
Ces actions, bien qu’elles s’inscrivent dans un contexte de revendications sociales réelles et légitimes, semblent aussi coïncider avec une campagne plus vaste et inquiétante de manipulation de l’opinion publique, avec des implications internationales notables – en particulier du côté français
Si l’on peut comprendre les frustrations sociales, un faisceau d’indices révèle une tentative de récupération politique et une instrumentalisation de ces crises à des fins de déstabilisation. Le récent rapport de l’Observatoire OSINT Clairvoyance met en lumière une opération numérique organisée visant à mobiliser la rue tchadienne contre les autorités en place. Ce rapport souligne la large diffusion sur WhatsApp et Facebook d’appels à manifester le 4 octobre sur la Place de la Nation à N’Djamena, orchestrée par la plateforme de l’opposition Tchad One, une agence basée en France et fondée par Chafardine Galmaye Saleh, auquel la nationalité tchadienne a été retirée par décret présidentiel le 18 septembre, en même temps que le journaliste N’Guebla Makaïla.
Fait troublant, plusieurs comptes à l’origine de cette campagne sont liés à des numéros de téléphone français et des domaines web enregistrés en France, ce qui laisse penser à une tentative de manipulation venue de l’extérieur, vraisemblablement depuis Paris. Cette opération s’inscrit dans un contexte de tensions croissantes entre N’Djamena et Paris, exacerbées depuis que le Tchad a décidé en novembre dernier de mettre fin à toute coopération militaire avec la France et d’expulser les troupes françaises du territoire, marquant la perte du dernier bastion militaire français dans le Sahel.
De surcroît, ces campagnes de mobilisation numérique semblent également viser à galvaniser l’opinion publique contre les récentes réformes politiques menées par le gouvernement tchadien, notamment celles adoptées par le Parlement pour renforcer l’architecture institutionnelle de l’État. Ces réformes, qui prolongent le mandat des parlementaires et consolident le pouvoir exécutif, sont présentées par l’opposition – avec l’appui de relais médiatiques français – comme une tentative d’établir une dynastie autour de la famille Déby.
Selon un expert en géopolitique et relations internationales, ces campagnes de mobilisation numérique ne relèvent pas du hasard. Elles traduisent une volonté stratégique d’affaiblir le gouvernement tchadien à travers une contestation sociale apparemment spontanée mais en réalité encouragée depuis l’étranger – notamment par des relais situés en France.
Il a ajouté que la France, ancienne puissance coloniale, peine à accepter la perte de son influence au Tchad. Elle adopte aujourd’hui des méthodes d’ingérence indirectes : soutien numérique à l’opposition, relais médiatiques hostiles, et campagnes coordonnées de déstabilisation. Sous prétexte de défendre la démocratie, certains acteurs français cherchent à manipuler l’opinion publique tchadienne pour maintenir un levier géopolitique.
L’expert estime que ces mouvements, qu’ils soient professionnels, estudiantins ou civils, doivent être analysés dans une logique globale d’affrontement entre souveraineté nationale et influences extérieures. Le Tchad a clairement signifié son rejet de toute tutelle étrangère. Il est donc impératif que la France respecte cette volonté d’indépendance au lieu de tenter de la contourner par des voies numériques et politiques.


















































































































































































































